Supplément au voyage de Cook

Supplément au voyage de Cook, (1ère représentation : 1935)

    "Outourou : Nous avons eu autrefois, dans l'île, un travailleur. Il allait chercher ses coquillages au large, alors que la côte en est tapissée. Il creusait des puits, alors que tout ruisselle ici de sources. Il détournait les cochons de notre herbe pour les engraisser avec une bouillie spéciale, et les faisait éclater. Tout dépérissait autour de lui. Nous avons été obligés de le tuer" (sc. 4).

     Mise en scène à l’Athénée en 1935 par Louis Jouvet en complément de La Guerre de Troie n’aura pas lieu, cette pièce en un acte est une parodie dans l’esprit du Supplément au voyage de Bougainville de Diderot, mais transposée en référence aux voyages de l’explorateur anglais James Cook (1728-1779) qui effectua trois expéditions dans l’océan Pacifique à bord du navire Endeavour et fit escale à Tahiti où il prit contact avec les indigènes. Les noms de Solander et Sullivan sont historiques, ainsi que celui de Mr Banks, qui était l’un des naturalistes de l’expédition. L’intrigue est construite autour de la conversation entre Mr Banks, affublé des fonctions de naturaliste-empailleur, incarnant la « civilisation », et les indigènes, hommes et femmes, représentés par leur roi Outourou et sa famille. Le sel de la comédie résulte de l’opposition et de la parfaite incompréhension entre Mr Banks, représentant guindé de la morale puritaine, fondée sur les principes sacrés de la civilisation, à savoir « le travail, la propriété et la moralité », et la liberté des mœurs des prétendus sauvages, qui ignorent et violent joyeusement tous les interdits sexuels, moraux et sociaux qui régissent les nations occidentales. La pièce est un pied-de-nez aux tabous de la morale et une souriante invitation aux plaisirs de l’épicurisme.