L’impromptu de Paris

L'impromptu de Paris, (1937)

« Le théâtre n'est pas un théorème, mais un spectacle, pas une leçon, mais un filtre. C'est qu'il a moins à entrer dans votre esprit que dans votre imagination et dans vos sens, et c'est pour cela, à mon avis, que le talent de l'écriture lui est indispensable, car c'est le style qui renvoie sur l'âme des spectateurs mille reflets, mille irisations qu'ils n'ont pas plus besoin de comprendre que la tache de soleil envoyée par la glace » (scène 3)

Créée en première partie d'une reprise de La Guerre de Troie n'aura pas lieu et sur le modèle de L'Impromptu de Versailles de Molière, cette courte pièce expose quelques-unes des grandes idées de Giraudoux sur le théâtre. Les personnages en sont les comédiens eux-mêmes : la troupe de Jouvet qui répète à l'Athénée, un après-midi de 1937. Un député nommé Robineau fait irruption sur scène. Ayant à décider de l'usage d'une subvention de cent millions, il demande à Jouvet de lui « expliquer le théâtre » en un quart d'heure. Jouvet commence par raconter un de ses rêves, où les critiques se cotisaient pour couvrir les déficits du théâtre. Puis, par sa voix, Giraudoux répond à ceux qui croient l'insulter en qualifiant ses pièces de « littéraires ». Jouvet justifie ensuite son goût prononcé pour le succès, sans lequel les comédiens sont des pantins et les auteurs des fantômes. Enfin, il apostrophe l'État en la personne de Robineau, que les machinistes ont élevé dans les airs au moyen d’une « gloire », et lui demande de reconnaître la dignité et l'utilité du théâtre: « un peuple n'a une vie réelle grande que s'il a une vie irréelle puissante ». Au-delà des allusions à l'actualité où il s'inscrit, le discours de Giraudoux -en particulier celui sur la place d’une telle forme d’art dans la société moderne- n’a rien perdu de son intérêt.