Lectures pour une ombre

Lectures pour une ombre, Paris, Grasset, Les Cahiers rouges, 2011 (1ère édition : 1917).

« Pardonne-moi, ô guerre, de t’avoir, toutes les fois où je l’ai pu, caressée ».

Jean Giraudoux, comme beaucoup d’écrivains de sa génération, a participé à la Grande Guerre. Incorporé dès août 1914, il vécut d’abord la campagne d’Alsace, puis la première Bataille de la Marne où il fut blessé. De cette première expérience de la guerre résulte Lectures pour une ombre, dédié à « A. Dufresnois, disparu ». Ce volume rédigé à partir de carnets de route, est organisé en trois volets : « Le Retour d’Alsace », « Périple », et enfin, le plus émouvant sans doute, « Les Cinq Soirs et les cinq réveils de la Marne ».
D’emblée, s’affirme la volonté de se démarquer d’une écriture réaliste. Giraudoux ne sera pas Barbusse. Il ne sera pas non plus de ceux qui se livrent à une esthétisation des combats. Les récits de Giraudoux décollent librement du réel, et semblent se donner pour but de ne raconter pendant la guerre, ce qui, justement n’est pas la guerre : scènes de paix, paysages, moments de camaraderie, anecdotes fugitives et drôles de la vie de régiment : mais ces scènes sont ponctuées de brèves images d’horreur, qui ne cessent de rappeler l’arrière-plan tragique sur lequel s’édifie cette écriture. Dès lors, ces œuvres se présentent davantage comme des « anti-récits de guerre », ou une forme de résistance à la guerre, selon les modalités qu’envisageait alors Aragon : « Négliger la guerre était de notre part un système, faux sans doute, mais dirigé contre la guerre. Nous pensions que parler de la guerre, fût-ce pour la maudire, c’était encore lui faire de la réclame. Notre silence nous apparaissait un moyen de rayer la guerre, de l’enrayer ».

Liste des textes : Le retour d'Alsace - Périple - Les Cinq Soirs et les cinq réveils de la Marne