La guerre de Troie n’aura pas lieu

La guerre de Troie n’aura pas lieu, édition présentée, établie et annotée par BODY Jacques, Paris, Gallimard, Folio, 2015 / La guerre de Troie n’aura pas lieu, édition présentée, établie et annotée par LANDEROUIN Yves, Paris, Garnier-Flammarion, 2015 (1ère édition : 1935)

« Les autres Grecs pensent que Troie est riche, ses entrepôts magnifiques, sa banlieue fertile. Ils pensent qu’ils sont à l’étroit sur du roc. L’or de vos temples, celui de vos blés et de votre colza, ont fait à chacun de nos navires, de vos promontoires, un signe qu’il n’oublie pas. Il n’est pas très prudent d’avoir des dieux et des légumes trop dorés. » (II, sc. 13)

Cette pièce était celle que Giraudoux aimait le moins. C’est peut-être pour les mêmes raisons qui nous la font aimer ; en effet il est rare qu’il affirme aussi clairement une position ou une idée. Il y avait quelque courage, en 1935, à donner aux commémorations nées après la première guerre mondiale leur juste poids et le discours aux morts d’Hector est toujours d’actualité ; il y avait aussi du courage à clamer qu’il n’y a pas de guerre juste ni justifiable.
Hector, héros vainqueur devenu champion de la paix, va accumuler les victoires, accepter les pires sacrifices pour sa cause, mais il échouera finalement, quelques pas seulement avant la victoire.
Peu importe de savoir si Hector a eu tort de tuer Démokos. Son échec n’est pas dû à une défaillance personnelle mais au destin qui doit s’accomplir. Hector est un héros tragique car Hélène est une envoyée du destin, et que le destin, quoi qu’on fasse pour l’éviter, s’accomplit toujours. Œdipe, pour ne citer que lui, est un bon exemple de cette loi.
Dans cette pièce, Giraudoux nous montre combien il connaissait intimement l’essence du tragique grec.